Il y a dans chaque être un ruisseau qui coule, de la source à l’estuaire, du printemps à l’automne ; un cours d’eau qui ne demande qu’à irriguer les terres passagères, qu’à rejoindre les rives qui ont été rêvées, qu’à retenir celles qui trop vagues dérivent…
Les points de suspension, ce sont comme des gestes effacés. Comme de ces miettes de pain qui restent après, sur la table. Voilà tout est dit, mais tout reste à dire. Tout est suspendu à quelque silence.
Valentin connaît bien ce silence. Il en use jusqu’à la corde. C’est de ce silence qu’il tire la substance même des mots. Il s’y enfouit jusqu’à ce qu’il entende la profondeur des choses. Alors, dire devient possible.
Valentin écrit depuis qu’il pense. À la vérité, c’est son impression. Mais qu’en a-t-elle à faire, sa mémoire, de la vérité ? Il pense qu’il écrit depuis qu’il pense. Enfin, c’est quelque chose comme ça.
Oui, Valentin est un danseur de mots – comme il existe des danseurs étoiles ou des danseurs de corde, des danseurs qui tournoient comme des derviches tourneurs, et d’autres qui dansent immobiles. Comme il existe la danse du feu, Valentin fait mijoter les mots. Dans le chaudron du verbe.